Home paysages portraits dessins actualité journal liens accueil Blog


La couleur et les harmonies. Le contraste simultané.

 


LE CONTRASTE SIMULTANÉ
. Aspects
pratiques
.

Passons
maintenant à un aspect important des harmonies, un moyen plastique
pour valoriser au mieux la personnalité d’un ton, sa chaleur,
sa lumière, sa vivacité.
Dans une peinture, une couleur se trouve rarement seule, sauf dans certaines
oeuvres contemporaines entièrement bleues, rouges ou… blanches.
Et si vous souriez, c’est que vous n’avez pas compris mieux que moi
la portée hautement signifiante de ce type de démarche.
Donc, une couleur est généralement associée à
une ou plusieurs autres. L’expérience nous démontre qu’une
couleur semble différente selon qu’elle côtoie l’une ou
l’autre surface colorée, un peu comme une personne de taille
moyenne semblera petite à côté d’un géant
et grande à côté d’un nain. Et réciproquement,
le géant apparaîtra plus grand et le nain plus petit à
côté d’une personne de taille moyenne.

Nous
n’entrerons pas ici dans le détail théorique de toutes
les implications entraînées par ce principe, celles et
ceux qui le souhaitent pourront l’approfondir en consultant l’excellent
ouvrage qui reste une référence: Johannes Itten, “Art
de la couleur”. il s’agit seulement pour nous de bien comprendre
que les caractéristiques d’une couleur ne sont pas fixes, mais
qu’au contraire elles se modifient en fonction de chaque environnement
coloré que le peintre lui attribue.

Avant
d’aller plus loin, regardons l’exemple ci-dessous, il nous fera rapidement
comprendre l’influence que peut avoir un ton sur un autre.

Regardez
attentivement les petits carrés gris situés au milieu
des carrés noir et blanc. Nous avons l’impression que le
carré entouré de noir est plus clair que celui entouré
de blanc, or en réalité, le gris est absolument identique.
Par contraste, le fond noir fait apparaître le gris plus clair
et le fond blanc donne l’impression que ce même gris est plus
foncé. Ceci démontre, non seulement que l’oeil est
facile à tromper – méfions-nous de ce que nous croyons
avoir vu – mais surtout que la sensation visuelle dégagée
par un ton, ou ici plus exactement par une valeur, est fortement
influencée par les propriétés des surfaces
qui l’entourent.

 

De
la même manière, si je considère à
gauche et à droite le petit carré vert, je peux
remarquer qu’il dégage une sensation visuelle différente
sur le fond gris et sur le fond vert . Il semble plus vif sur
le gris que sur le vert. Le contraste a joué dans le cas
présent sur l’impression de saturation. Le gris étant
neutre, donc d’une saturation nulle, il renforce la saturation
du vert.

Si
on regarde attentivement l’illustration ci-contre, on pourra remarquer
que la bande de couleur uniforme, située au milieu des
zones rouge et verte ne donne pas la même sensation tonale
dans ces deux parties, le rouge va la colorer de vert, le vert
va l’orienter vers le rouge, c’est-à-dire chacune vers
leur complémentaire.
Cette caractéristique est un des aspects fondamentaux du
contraste simultané.

Ce
qui signifie que si on veut renforcer la spécificité
d’une couleur, on la fera côtoyer des tons qui lui sont
complémentaires.

 


Pour être pratiques, retenons de tout ceci que:


si nous souhaitons qu’une surface apparaisse claire et lumineuse,
on l’entourera de valeurs plus sombres,


si nous souhaitons qu’elle semble plus chaude, nous l’entourerons
de couleurs plus froides,


si nous souhaitons qu’elle apparaisse plus vive, nous l’entourerons
de couleurs moins saturées,


si nous voulons qu’un ton apparaisse dans toute sa particularité,
nous mettrons à proximité un ton opposé,
sa complémentaire ou une nuance qui s’en approche.

 

Nous
pourrons jouer sur un de ces aspects ou sur plusieurs, plus il y aura
d’aspects contrastes, plus la différence sera mise en exergue.
Attention de toujours intégrer un contraste, de progressivement
l’introduire par des similitudes de tons, valeurs, température,
saturation.

Insistons
sur le fait que l’influence d’un ton sur un autre s’exerce dans les
deux sens, chacun influençant la sensation visuelle dégagée
par l’autre.

Vous
connaissez peut-être l’expérience qui consiste à
regarder pendant quelques secondes le soleil de face alors qu’il vient
à peine d’émerger de l’horizon et qu’il ne présente
pas encore trop de danger par la violence de ses rayons. Après
quelques secondes, on ferme les yeux en mettant la paume des mains sur
les paupières pour créer un noir réel. L’empreinte
du soleil reste marquée sur la rétine sous forme de ce
que l’on appelle un phosphène, mais les couleurs ont changé;
l’orangé du soleil est devenu bleu, le rouge est devenu vert,
c’est-à-dire que la projection dans le noir a engendré
la complémentaire de la couleur du soleil…
Ceci n’est qu’une des multiples expériences qui montrent qu’une
couleur “appelle” sa complémentaire, que la lumière
n’est pas lumière sans les ombres, le chaud sans le froid, etc.

Léonard
de Vinci avait déjà évoqué ces constatations,
plus tard ce sera Goethe, mais surtout au XIXe siècle, Eugène
Chevreul, un chimiste français qui a beaucoup influencé
les Impressionnistes, témoin le tableau de Monet “la
rue de Barolle à Honfleur” (1864), ci-contre.

Une
impression de soleil et de chaleur se dégage de la scène,
particulièrement à droite de la rue où les
façades sont frappées par la lumière. Monet
va jouer ici sur les différentes propriétés
du contraste simultané:

-Les façages de droite et le bleu du ciel sont d’autant plus
clairs que les maisons de gauche et l’ombre portée au sol
sont foncées,

– Ces mêmes façades sont d’autant plus chaudes que
le bleu du ciel et les maisons de gauche ainsi que l’ombre portée
sur la route sont froids. Monet et à sa suite les autres
impressionnistes, ont pris l’habitude d’introduire du bleu ou du
violet dans les mélanges destinés à figurer
les ombres, ce qui entre autres les a nettement distingués
des académistes qui utilisaient le noir ou le bitume à
cet effet.

– Le jaune des maisons de droite est d’autant plus jaune orangé
que les mélanges pour peindre le reste du tableau contiennent
du bleu.


Le bleu du ciel et les couleurs des maisons de droite sont d’autant
plus saturés que le reste du tableau est peint dans des saturations
plus discrètes, tons rompus, gris colorés.

Et
réciproquement!

 

milieu

 

Les matières picturales >

 

 



© "Le manuel du peintre" dans le Louvre de Michel Barthélemy